En 1970, Claude Gauvreau commente sa célèbre pièce et explique sa démarche poétique visionnaire 

Bien que je sois d'accord sur le fait que le monde hautement codifié par la culture du web dans lequel nous vivons puisse encourager le conformisme, je ne suis pas d'accord sur le fait que des libertés individuelles soient retirées à des individus par les recherches récentes sur la langue. Au contraire, les recherches actuelles des sciences humaines sur la langue comme instrument de pouvoir, instrument d'oppression, qui "peinture l'Autre dans le coin" pour le garder hors d'état de nuire: toutes ces réflexions, décoloniales, queers, féministes, participent du même projet que celui des automatistes. Je veux dire par là que ces sciences réfléchissent à des manières d'arrêter les oppressions et que leur outil principal est le langage. Je pense qu'en ce sens les automatistes, tels que Gauvreau, seraient bien d'accords. Et d'ailleurs, des mots sont toujours inventés chaque jour pour décrire de nouvelles réalités, c'est un processus qui continue encore aujourd'hui de changer la face du monde et de questionner les catégories abusives et manichéennes (telles que: Gars-fille, étranger-connu, noir-blanc, etc.) afin de créer un monde tout en subtilité, et en complexité!

@@lebabouneux J'imagine que je n'ai pas été assez clair. Je ne parlais certainement pas des recherches actuelles des sciences humaines sur la langue. Je n'y connais pas grand chose dans le monde universitaire. Je parlais des mots comme père et mère que l'on remplace par parent 1 et parent 2. Je parlais de la « cancel culture » qui cherche à orienter la politique par le contrôle du langage. Je voulais dire que nous étions plus libre il y a 50 ans que nous le sommes maintenant. Plusieurs des monologues de Yvon Deschamps ne passeraient plus aujourd'hui. Raoul Duguay avec l'Infonie non plus. Pierre Vallières avec son livre dont on ne peut même plus prononcer le titre. La Cancel culture n'est pas une contre-culture. La cancel culture défend l'ordre établi. Avant, la gauche défendait les travailleurs. Aujourd'hui Oliver Anthony chante « Rich Men North of Richmond » et la gauche se sent attaquée. Le monde et à l'envers quand quelqu'un qui s'attaque aux riches est associé à l'extrême droite.

@@sanzalure6091 De mon point de vue, vous référiez tous deux bel et bien au même phénomène de langage. Par contre, je ne vois pas trop en quoi la cancel culture défend l'ordre établi, je serais curieux de comprendre ce qui vous fait dire ça. Je dis pas ça parce que je la back à 100% non plus, au contraire. D'ailleurs, je trouve que ce à quoi ce terme fait référence est assez large et diffus. Pour la question du langage qui nous occupe, le fait de ramener à l'avant-scène certains mots, ce n'est pas de la censure. Ça nous permet de les réactualiser, les redéfinir collectivement, d'uniformiser un peu les définitions que telle ou telle autre personne peut en avoir. Ça nous permet ensuite plus de nuances, il me semble. Si on prend en exemple le mot "nègre" que tu suggérais. Il n'a pas été interdit publiquement. Il a été décortiqué publiquement. Entre les descendants d'esclaves, de colons, d'immigrants, ce mot résonnait de façons très différentes. Aujourd'hui, un peu moins. On s'est partagé collectivement sur ce que ce mot signifie pour nous, depuis on en comprend mieux les nuances, et le mot est un peu plus proche de signifier la même chose pour tout le monde. Bref on peut mieux communiquer. À l'heure d'aujourd'hui, je pense qu'il y a plus de blancs qui comprennent que ça peut-être insultant de l'utiliser. Et si on entre plus creux dans les nuances, qui comprennent comment un changement de ton, de contexte, d'interlocuteur, etc., changera le retentissement de ce mot. Après, l'histoire du prof qui s'est fait sanctionné pour avoir cité le titre de Vallières, ça c'est tordu en criss. Pour moi, c'est la démonstration, justement, qu'on manquait de nuances face à ce mot. Mais il s'agit pas de censure, plus d'un fait divers. C'est arrivé une fois, et ç'a permis de débloquer un discours sur ce mot-là pour lequel on était dû. .....après ça....comme par hasard.....c'est arrivé au Canada anglais. Y'en a des couches, on va pas se mentir. Sachant aussi que le livre en question commence par Vallières qui show off son prétendu n-word pass, qui lui aurait été donné par nul autre que des membres des Black Panthers. En tout cas. On pourrait être ici toute la journée.